
Article provenant du journal "Le Matin"
La soul, bande-son de la vie de Phil Collins
C’était l’un des événements du Montreux Jazz Festival. Jeudi soir, Phil Collins a rendu hommage au répertoire de la Motown, devant 3500 spectateurs.
Les Suisses adorent Phil Collins. Ils l'aiment tellement que les billets de son concert se sont vendus en un temps record. Ils sont donc venus, ils sont tous là. On pense notamment à cet ancien conseiller fédéral, Pascal Couchepin, qui a fait le déplacement avec son épouse pour assister à l'événement inaugural de l'édition 2010 du Montreux Jazz. Et l'on voit encore, à une entrée latérale de la salle, Orianne et les enfants Collins.
A 20h30 précises, un premier musicien entre en scène, poussé dans sa chaise roulante. C'est Bob Babbitt, légendaire membre des Funk Brothers, plus de cinquante ans de Motown dans les pattes. Il sera suivi des dix-huit autres instrumentistes et vocalistes, formant un arc-en-ciel de couleur sur la scène du Stravinski.
Les cuivres résonnent, on annonce Phil Collins et c'est l'ovation. Costume noir, cravate blanche - il faut bien faire honneur à la soul -, un air assez solennel, le chanteur entame un «Ain't too proud to beg» euphorisant, enchaîné par «Girl». Les yeux fermés, concentré sur son répertoire, Phil Collins tente de l'habiter. Jusqu'à «Papa was a rolling stone», des Temptations. Instant magique, audacieux, inventif, où il se révèle excellent.
«Bonsoir les Suisses, vous vous demandez pourquoi je suis là, n'est-ce pas? Il y a deux ans, j'ai commencé à travailler sur un album de soul music, avec des chansons qui sont la bande-son de ma vie», dit-il au public.
Ce dernier le suit décidément très peu. Des clappements de main par ci, quelques dodelinements de la tête par là. Point d'effusion.
Le chanteur se fait doux sur le slow de Stevie Wonder, «Never dream you'd leave in Summer», plus emballé sur «Jimmy Mack». Il interprète les Ronettes, Smokey Robinson, à plusieurs reprises. Sans entrer réellement dans leur monde. Il a pourtant tous les atouts en main: une voix qui se prête au genre, un big band en renfort. Malgré ça, la magie se fait attendre. Est-ce le choix des morceaux? Plus probablement ce répertoire, cette légende lourde à assumer.
Sur «Going back», chanson titre de son prochain album qui doit paraître en septembre, Phil Collins se fait très introspectif. On imagine alors ces bouts d'enfance qui lui trottent dans la tête. Emotion. Puis il repart pour un tour de chauffe avec «Talking about my baby». Il faudra attendre «You can't hurry love», l'une de ses premières reprises de soul des années 1980, pour que le public se lève, danse et chante avec lui.
«Phil Collins n'est pas Anglais!»
Cela devient une évidence: cette chanson est le premier lien que les spectateurs ont tissé avec Phil Collins, qu'ils connaissent depuis plus de trente ans. Cela signifierait-il qu'on ne lui permette pas d'interpréter autre chose que ses propres chansons? On se met alors à rêver d'une visite soul de ses succès. Tiens, ça donnerait quoi «In the air tonight» ou «Against All Odds» en version soul? A peine le temps de se poser la question que le chanteur dit au revoir avec «My Girl».
Alors qu'on s'attendait à un dernier rappel, voilà Claude Nobs et Quincy Jones qui débarquent sur scène, micro en or à la main. Visiblement ému, le maître de cérémonie remercie Phil Collins de ce concert rare. Quincy Jones, lui, succède au micro et commence à évoquer Phil Collins, puis parle de lui, avant de revenir à l'ex-chanteur de Genesis. «On croit qu'il est Anglais mais ce n'est pas vrai, il vient du côté soul de Chicago!». On aurait tellement voulu y croire.

Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire